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Sunday, May 25, 2014

Cancers du sein : 

quels sont les vrais facteurs de risque ?

Paris, le lundi 19 mai 2014 – 

Parce qu’il est le cancer le plus fréquent chez les femmes et sans doute également parce qu’il existe un programme de dépistage systématique (qui est par ailleurs l’objet de polémiques), on ne compte plus le nombre d’études suggérant l’existence d’un lien entre tel ou tel comportement et le risque de souffrir d’un cancer du sein. Ces corrélations pas toujours parfaitement étayées par des statistiques fiables sont souvent largement reprises dans les médias, en particulier lorsqu’il s’agit de pointer du doigt quelques substances chimiques. Il a ainsi été beaucoup affirmé que l’usage de certains déodorants ne serait pas sans risque. De même, des doutes ont émergé concernant l’impact de différents traitements hormonaux. On a également assisté à la longue énumération des aliments (thé, café, tomate) qu’il serait saint d’éviter. Enfin, certains spécificités anatomiques (taille des seins, port de prothèse) ont pu être dans la ligne de mire.

Homogénéiser la surveillance des femmes à risque

Face à cette multitude d’informations, au degré de fiabilité très variable, la Haute autorité de Santé (HAS) a souhaité réaliser une étude complète de l’abondante littérature scientifique publiée sur ce sujet. Dans ses conclusions qu’elle publie aujourd’hui, elle note qu’au total « 69 facteurs de risque présumés » ont pu être identifiés. Mais les données disponibles ne sont suffisamment convaincantes de l’existence d’une augmentation réelle du risque ou d’une augmentation modérée voire modeste d’un mauvais pronostic du cancer que pour sept d’entre eux. Il s’agit :
« des antécédents personnel de cancer du sein invasif ou de carcinome canalaire in situ ; des antécédents d’hyperplasie canalaire atypique, d’hyperplasie lobulaire atypique ou de carcinome lobulaire in situ ; des antécédents de radiothérapie thoracique (irradiation thoracique médicale à haute dose pour maladie de Hodgkin) ; des antécédents familiaux de cancer du sein avec score d’indication à la consultation d’oncogénétique ≥ 3 selon le score d’Eisinger* en l’absence de mutation génétique identifiée dans la famille ».
Pour chacun de ces cas, déjà bien identifiés par les équipes soignantes, la HAS a défini les modalités de dépistage qui devraient être mises en œuvre. Elle a notamment précisé l’âge auquel la surveillance doit être débutée et sa fréquence, les examens à réaliser et la durée du suivi. « L’enjeu de ces recommandations est d’améliorer et d’homogénéiser les pratiques de dépistage chez ces femmes, notamment d’éviter des examens radiologiques trop fréquents, trop rapprochés ou à un âge trop jeune » précise l’institution dans un communiqué.

Travail de nuit : un risque pas suffisant pour justifier un dépistage précoce ou particulier

Parmi les risques présumés qui ont été écartés, certains sont considérés comme inexistants. Il en est ainsi du fait de porter des implants ou de consommer certains aliments (thé, café, tomate…), mais aussi du tabagisme. Pour d’autres, « les données scientifiques ne sont pas suffisamment fiables ». Il s’agit par exemple du recours à certains déodorants, de la densité mammaire après la ménopause ou encore de la taille des seins. Enfin, pour certains facteurs, une augmentation modérée voire modeste du risque semble être confirmée : l’absence de grossesse, la prise de traitement hormonal substitutif, de contraception, l’obésité ou encore le travail de nuit. Néanmoins, les chiffres obtenus ne permettent pas de justifier un dépistage particulier, précise le président de la HAS, Jean-Luc Harrousseau, interrogé notamment sur France Info sur le choix de la HAS de ne pas retenir le critère concernant le travail de nuit. De même sur le tabagisme, il note : « De nombreuses études montrent que le tabagisme entraîne soit pas d’augmentation, soit une augmentation modeste du risque. Ce qui ne justifie pas de modification de la stratégie actuelle du dépistage organisée ».

Quid du programme systématisé ?

Au final, la HAS n’a retenu que des facteurs de risque non modifiables comme justifiant la mise en place d’une surveillance spécifique. Ce choix traduit la volonté de mettre un terme aux affirmations non vérifiées sur certains comportements prétendument cancérigènes. Son caractère aussi tranché pourrait cependant ne pas permettre d’atteindre son objectif. Il est probable que les supputations les plus diverses continueront à circuler. Enfin, ces recommandations sur les modalités spécifiques de dépistage ne disent rien sur les controverses qui entourent le programme de dépistage national qui ne retient pour sa part qu’un seul critère : l’âge.
Aurélie Haroche

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