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Sunday, May 19, 2013

Bataille familiale autour de la fin de vie d’un homme de 37 ans


Bataille familiale autour de la fin de vie d’un homme de 37 ans

Publié le 16/05/2013
     

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Paris, le jeudi 16 mai 2013 – Certains se souviennent peut-être de l’affaire Terri Schiavo qui avait défrayé la chronique aux Etats-Unis en 2005. La jeune femme, dans un état "semi végétatif" après un accident de voiture avait été veillée pendant treize ans par son époux et sa famille avant qu’ils ne se déchirent sur le sort de Terri. L’époux estimait qu’elle n’aurait jamais supporté une telle situation et souhaitait la suspension de son alimentation et de son hydratation, quand la famille refusait une telle issue. Une longue bataille juridique s’en suivit qui finit par donner raison à l’époux de Terri.
Entraîner la mort mais ne pas la donner
Une affaire semblable agite aujourd’hui une famille française. Vincent, infirmier, âgé de 37 ans et père d’une petite fille est dans un état pauci-relationnel depuis un accident de la route survenu il y a quatre ans. Au début de l’année, les médecins qui le prennent en charge au sein de l’unité de soins palliatifs du CHU de Reims ont observé une modification de comportement du patient, semblant suggérer un désir de mourir. Dès lors ils ont recueilli le sentiment de son épouse et d’une partie de sa famille avant, à l’issue d’une procédure collégiale, de décider d’interrompre l’hydratation et l’alimentation du patient. Ce geste ne relève pas de l’euthanasie précisait ce matin sur RTL le docteur Vincent Morel président de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) mais du refus de l’acharnement thérapeutique. Néanmoins, il conduit inévitablement à la mort, ce qu’autorise la loi sur l’accompagnement de la fin de vie, dite loi Leonetti.
Des parents exclus de la consultation préalable
Cependant, les parents de Vincent, qui vivent à 800 km ont appris incidemment cette interruption de l’alimentation, à l’occasion de la visite d'un de leurs fils à son frère. Ne parvenant pas à faire changer la position des médecins, ils ont intenté une procédure d’urgence devant le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne. Ce dernier a estimé dans sa décision qu’en ne consultant pas les parents, les médecins du CHU de Reims avait méconnu les dispositions de la loi Leonetti. Aussi, la réalimentation et réhydratation du patient ont-elles été ordonnées.
Une loi facilement accusée d’être floue
Le CHU de Reims qui précise que la justice ne remet pas en cause « le fond de la décision prise par l’équipe médicale », reconnaît avoir « failli sur une partie de l’accompagnement de sa famille ».
Cependant, les praticiens prenant en charge Vincent se défendent en remarquant que les dispositions de la loi Leonetti sont floues. L’opacité de ces dernières n’est cependant pas acquise pour tous.
L’article 37 du code de déontologie médicale indique que « la décision de limitation ou d'arrêt de traitement prend en compte les souhaits que le patient aurait antérieurement exprimés, en particulier dans des directives anticipées, s'il en a rédigé, l'avis de la personne de confiance qu'il aurait désignée ainsi que celui de la famille ou, à défaut, celui d'un de ses proches ». Certains pourraient estimer que la notion de famille devrait être plus précisément définie en détaillant les degrés de parenté des personnes devant être consultées.
Mourir de faim : une fin hypocrite ?
La relative clarté de la loi Leonetti sur les personnes devant être interrogées avant la mise en œuvre de la décision collégiale des médecins n’empêche pas aujourd’hui de nombreux commentateurs d’affirmer que cette dramatique affaire familiale confirme la nécessité d’une nouvelle loi sur l’accompagnement de la fin de vie. On relèvera plus certainement que le choix actuel de la France d’interdire l’euthanasie active mais de permettre des gestes entraînant la mort peut « faciliter » ce type de revirement. De fait, l’interruption de l’alimentation et de l’hydratation est une décision prise relativement régulièrement confirme le docteur Vincent Morel. Si pour les opposants à l’euthanasie, il s’agit d’une solution permettant de concilier l’aspiration de certains à mourir et le respect de l’interdiction de donner la mort, certains ne manquent pas de s’inquiéter des souffrances de ces patients privés d’alimentation. Vincent Morel assure que ces derniers ne souffrent pas. Cependant, quelques cas fortement médiatisés (tel celui d’Hervé Pierra en 2006) montrent que le "départ" de ces patients n’est pas toujours serein. A cet égard, dans nos colonnes, le président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, Jean
Luc Romero observait :
 « Il faut cesser le discours selon lequel l’arrêt de l’hydratation, de l’alimentation ne fait pas souffrir. Personne n’a été dans cette position là pour savoir ce que ça fait réellement. Et surtout, en quoi est-ce plus cruel de permettre à quelqu’un de partir en quelques secondes, sans souffrance, après une injection létale ou en avalant soi-même un produit, en quoi cela est-ce absolument abominable alors que ce ne serait pas abominable d’arrêter d’hydrater et d’alimenter un patient ? ».

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