Insuffisance rénale chronique terminale : comment améliorer l’efficience de la prise en charge ?
Dans un contexte d’augmentation du coût de la prise en charge de
l’insuffisance rénale chronique terminale, la HAS et l’Agence de la
biomédecine ont modélisé les possibilités de changement dans la
trajectoire de soins des patients et évalué leurs conséquences d’un
point de vue clinique et économique. Elles publient leur rapport qui
confirme que le développement de la transplantation rénale dans tous les
groupes d’âge est une stratégie efficiente par rapport à l’ensemble des
stratégies évaluées. Au-delà de la transplantation, limitée par le
nombre de greffons, les travaux montrent qu’il est possible de faire
évoluer la place des différentes modalités de traitement en développant
la dialyse hors centre. Et qu’il existe plusieurs stratégies de dialyse
alternatives, moins chères que la situation observée pour une efficacité
équivalente.
L’insuffisance rénale chronique (IRC) est
une maladie des reins d’évolution silencieuse : progressivement, la
fonction de filtration des reins se détériore et peut évoluer vers un
stade terminal (IRCT) nécessitant la mise en place d’un traitement de
suppléance par dialyse ou transplantation rénale. Les dix modalités de
traitement de l’IRCT prises en compte dans l’évaluation sont :
L’objectif était d’évaluer les conséquences d’un point de vue clinique et économique de modifications dans les trajectoires de soins des patients entre les différentes modalités de traitement, en tenant compte des possibilités d’évolution par rapport à la situation observée et sans remettre en cause la liberté de choix des patients de leur modalité de traitement.
Dans une première étape, la revue de la littérature internationale a fourni un état des connaissances sur l’évaluation médico-économique de la prise en charge de l’IRCT. Elle a également mis en évidence l’importance de conduire un travail à part entière sur l’analyse des possibilités de développement de la transplantation rénale en France qui a fait l’objet d’un volet spécifique publié en 2012.
Dans une deuxième étape, une étude de coût a permis d’analyser les différences selon les modalités de traitement (prise en considération du lieu de prise en charge et de l’environnement médical et paramédical et non uniquement de la technique de traitement), les facteurs de variation liés aux caractéristiques cliniques des patients (âge et statut diabétique) et la position des patients dans la trajectoire de soins (démarrage du traitement, changement de traitement, décès). Elle a été réalisée à partir de l’analyse des données du système d’information de l’Assurance maladie. A titre d’exemple, elle montre que le coût moyen mensuel de traitement d’un patient avec une « prise en charge stable1 » est de 7253€/mois pour l’hémodialyse en centre et de 4377€/mois pour l’autodialyse. Pour la dialyse péritonéale, le coût de la DPA assistée est de 5744€/mois et celui de la DPCA non assistée de 3774€/mois.
Enfin, la dernière étape a consisté en une évaluation médico-économique des différentes stratégies de prise en charge fondée sur une approche par trajectoire. Ce travail a nécessité de développer un modèle permettant de prendre en compte les différentes modalités de traitement reçues au cours du temps par les patients depuis le démarrage du traitement de suppléance ainsi que les données de coûts associées à ces différentes modalités2. Il a permis de simuler des changements de trajectoire des patients dans dix modalités de traitement et ainsi d’évaluer les conséquences en termes de coût et d’efficacité (espérance de vie) de différentes stratégies de prise en charge pour 6 groupes de patients : 18-44 ans, 45-69 ans et 70 ans et plus, et selon le statut diabétique.
Partant de la place importante de l’hémodialyse en centre dans les trajectoires des patients relevées dans les données du registre REIN3, et considérant qu’une partie des patients pouvaient être pris en charge différemment sans perte de chance, l’évaluation a voulu déterminer l’impact médico-économique de stratégies alternatives définies selon 4 axes : développement de la transplantation rénale ; développement de la dialyse hors centre ; préférence des patients pour des traitements qui favorisent leur autonomie et prise en charge à proximité du domicile des patients.
La rareté des greffons a justifié d’évaluer l’impact médico-économique de stratégies de dialyse avec des choix différents des pratiques observées à partir des données du registre REIN et en explorant plusieurs pistes : développer l’autonomie, la proximité de l’offre par rapport au domicile et la diversité des modes de prise en charge.
Par ailleurs, par rapport à la stratégie de prise en charge observée, la plupart des stratégies alternatives évaluées apparaissent comme aussi efficaces et moins coûteuses :
- l’hémodialyse : en centre, en unité de dialyse médicalisée (UDM), en unité d’autodialyse, à domicile ;
- la dialyse péritonéale : dialyse péritonéale automatisée (DPA) et dialyse péritonéale continue ambulatoire (DPCA), assistée ou non assistée par une infirmière sur le lieu de vie ;
- la transplantation rénale (greffe) à partir de donneur décédé ou vivant.
L’objectif était d’évaluer les conséquences d’un point de vue clinique et économique de modifications dans les trajectoires de soins des patients entre les différentes modalités de traitement, en tenant compte des possibilités d’évolution par rapport à la situation observée et sans remettre en cause la liberté de choix des patients de leur modalité de traitement.
Un travail en 3 étapes : revue de la littérature, réalisation d’une étude de coût et mise en place d’un modèle novateur
Dans le cadre de leur partenariat, la HAS et l’Agence de la biomédecine, avec l’appui d’un groupe de travail pluridisciplinaire et multiprofessionel associant des représentants des patients, ont d’abord procédé à une analyse de la littérature, réalisé une étude de coût pour ensuite mener une évaluation médico-économique.Dans une première étape, la revue de la littérature internationale a fourni un état des connaissances sur l’évaluation médico-économique de la prise en charge de l’IRCT. Elle a également mis en évidence l’importance de conduire un travail à part entière sur l’analyse des possibilités de développement de la transplantation rénale en France qui a fait l’objet d’un volet spécifique publié en 2012.
Dans une deuxième étape, une étude de coût a permis d’analyser les différences selon les modalités de traitement (prise en considération du lieu de prise en charge et de l’environnement médical et paramédical et non uniquement de la technique de traitement), les facteurs de variation liés aux caractéristiques cliniques des patients (âge et statut diabétique) et la position des patients dans la trajectoire de soins (démarrage du traitement, changement de traitement, décès). Elle a été réalisée à partir de l’analyse des données du système d’information de l’Assurance maladie. A titre d’exemple, elle montre que le coût moyen mensuel de traitement d’un patient avec une « prise en charge stable1 » est de 7253€/mois pour l’hémodialyse en centre et de 4377€/mois pour l’autodialyse. Pour la dialyse péritonéale, le coût de la DPA assistée est de 5744€/mois et celui de la DPCA non assistée de 3774€/mois.
Enfin, la dernière étape a consisté en une évaluation médico-économique des différentes stratégies de prise en charge fondée sur une approche par trajectoire. Ce travail a nécessité de développer un modèle permettant de prendre en compte les différentes modalités de traitement reçues au cours du temps par les patients depuis le démarrage du traitement de suppléance ainsi que les données de coûts associées à ces différentes modalités2. Il a permis de simuler des changements de trajectoire des patients dans dix modalités de traitement et ainsi d’évaluer les conséquences en termes de coût et d’efficacité (espérance de vie) de différentes stratégies de prise en charge pour 6 groupes de patients : 18-44 ans, 45-69 ans et 70 ans et plus, et selon le statut diabétique.
Partant de la place importante de l’hémodialyse en centre dans les trajectoires des patients relevées dans les données du registre REIN3, et considérant qu’une partie des patients pouvaient être pris en charge différemment sans perte de chance, l’évaluation a voulu déterminer l’impact médico-économique de stratégies alternatives définies selon 4 axes : développement de la transplantation rénale ; développement de la dialyse hors centre ; préférence des patients pour des traitements qui favorisent leur autonomie et prise en charge à proximité du domicile des patients.
La transplantation rénale efficiente par rapport à l’ensemble des stratégies évaluées
Dans tous les groupes d’âge, le développement de la transplantation rénale est une stratégie efficiente par rapport à l’ensemble des stratégies évaluées. Dans le premier volet de leur travail, la HAS et l’Agence de la biomédecine préconisaient dès 2012 plusieurs pistes : développer la transplantation rénale à partir de donneurs décédés grâce à l’amélioration du recensement des donneurs, diminuer le taux de refus et élargir le cercle de donneurs potentiels ; développer la transplantation à partir de donneurs vivants ; renforcer le suivi au long cours des donneurs et receveurs ; attribuer les greffons disponibles en tenant compte des exigences d’efficacité et d’équité.La rareté des greffons a justifié d’évaluer l’impact médico-économique de stratégies de dialyse avec des choix différents des pratiques observées à partir des données du registre REIN et en explorant plusieurs pistes : développer l’autonomie, la proximité de l’offre par rapport au domicile et la diversité des modes de prise en charge.
Des stratégies alternatives différentes selon les groupes d’âge
Par rapport à l’ensemble des stratégies évaluées, certaines sont efficientes : c’est le cas des stratégies fondées sur le développement conjoint de l’hémodialyse hors centre et de la dialyse péritonéale dans les trajectoires des patients de plus de 45 ans.Par ailleurs, par rapport à la stratégie de prise en charge observée, la plupart des stratégies alternatives évaluées apparaissent comme aussi efficaces et moins coûteuses :
- chez les patients d’âge intermédiaire (45-69 ans), les stratégies fondées sur le développement de la dialyse péritonéale non assistée au démarrage du traitement de suppléance suivi par l’hémodialyse en autodialyse ou en UDM dans les trajectoires des patients.
- chez les patients de plus de 70 ans, les stratégies fondées sur le développement de la dialyse péritonéale assistée au démarrage suivi par l’hémodialyse en UDM dans les trajectoires des patients.
- chez les patients jeunes (de moins de 45 ans), l’impact du développement des stratégies de dialyse est limité dans la mesure où ils vivent la plupart du temps avec un greffon fonctionnel.
- Une prise en charge stable correspond à un patient qui est resté au moins 9 mois dans la même modalité de traitement durant la période de l ‘étude.
- Cet outil a été alimenté par les données disponibles dans le registre REIN et les données issues de l’étude de coût.
- REIN est le registre français des traitements de suppléance de l’IRCT basé à l’Agence de la biomédecine.
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