Allodynie et hyperalgésie au cours des douleurs neuropathiques
Dans 15 à 50 % des cas, les patients souffrant de douleurs
neuropathiques, périphériques ou centrales, présentent des
phénomènes d’allodynie ou d’hyperalgésie. Rappelons que dans le
premier cas, il s’agit d’une sensation douloureuse en réponse à un
stimulus normalement indolore ; dans le second cas, il existe une
douleur trop importante par rapport à l’intensité du stimulus
douloureux.
Ces deux symptômes sont classés selon le canal
sensoriel utilisé (toucher, pression, piqûre, froid et
chaud). Or dans les essais cliniques, notamment
thérapeutiques, les principaux critères d’évaluation choisis sont
l’intensité de la douleur et l’importance du soulagement.
Les résultats antalgiques n’étant pas toujours satisfaisants
avec les thérapeutiques actuelles, TS Jensen et NB Finnerup ont
revu les différentes données existantes sur ces deux symptômes
fréquents, quoique non spécifiques des douleurs neuropathiques dont
la prise en compte dans les études cliniques pourrait permettre
d’améliorer la compréhension et le traitement des douleurs
neuropathiques.
Cliniquement, il est facile de les rechercher au lit du patient
en utilisant un morceau de coton, la pression au doigt, une piqûre
légère, l’application de froid ou de chaud. Des procédés plus
sophistiqués peuvent aussi être employés (laser, monofilaments,
etc.). Il est aussi intéressant de retrouver des zones
gâchette, de tester les parties du corps non douloureuses et
d’établir une carte corporelle des anomalies retrouvées.
On distingue trois types principaux d’allodynie et
d’hyperalgésie mécaniques : induites par le toucher, la piqûre ou
la pression de la peau et des tissus profonds. Et, de fait, les
structures neurologiques en cause sont différentes dans ces trois
cas.
Ainsi, les fibres A-bêta ont un seuil abaissé dans les
douleurs induites par le toucher.
L’allodynie et l’hyperagésie
provoquées par une piqûre de faible intensité mettent en jeu
d’autres fibres, A-delta et C. Quant aux symptômes induits par la
pression, ils sont généralement de durée moins longue,
limités à la zone primitive d’hyperalgésie et mettent en jeu une
sensibilisation des nocicepteurs périphériques. Les
mécanismes moléculaires en cause sont eux-mêmes multiples et
complexes.
Quant à l’allodynie et l’hyperalgésie d’origine thermique, les
constations sont similaires. Le rôle d’une sensibilisation
périphérique et centrale étant évoqué, ainsi qu’une désinhibition
centrale, en cas de symptômes provoqués par le froid. De même,
l’hyperalgésie au chaud semble médiée de façon périphérique ou
centrale.
En matière d’essais cliniques, ces symptômes peuvent aussi être
utiles pour prédire l’efficacité d’un traitement. Pour exemple,
l’hyperalgésie à la piqûre apparaît prédire l’effet de la
prégabaline dans la polyneuropathie liée au VIH ; l’allodynie au
toucher semble prédire la réponse à la lamotrigine dans les lésions
médullaires.
Au total, l’allodynie et l’hyperalgésie, souvent associée à un
déficit sensitif, reflètent l’activité du système nociceptif et
pourraient permettre de mieux appréhender les mécanismes des
douleurs neuropathiques et d’aider à l’évaluation de médicaments
plus spécifiques.
Dr Patricia Thelliez
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