Translate

Saturday, February 7, 2015

Croire en une fin de vie sans souffrance

Ghislain Leblond
© PHOTO DIDIER DEBUSSCHÈREGhislain Leblond
Atteint d’une maladie dégénérative, ­c’est avec émotion que Ghislain Leblond a accueilli le jugement favorable de la Cour suprême sur l’aide médicale à mourir, qui lui permet maintenant de croire en une fin de vie digne, honorable et loin de l’agonie.
«Si les choses devaient prendre une tournure tout à fait inhumaine, il y aura un recours disponible. Ça me rend, moi et ma famille, plus serein. Je l’étais déjà beaucoup par la loi 52, au Québec, mais là, je suis encore plus réconforté», a commenté, ému, l’ancien sous-ministre de l’Industrie, joint par téléphone en Floride.
Pour le cofondateur du Collectif mourir digne et libre, la fin peut maintenant être perçue comme autre chose que la souffrance et la douleur.
«Je suis comme les autres : j’aimerais bien mourir dans mon sommeil, sans m’en rendre compte. Mais il y a un scénario, dans ma condition, que je ne peux pas ignorer, à l’effet que je pourrais me trouver un moment donné prisonnier de mon corps, paralysé, sans aucune qualité de vie, avance-t-il. Lorsqu’on sait qu’il y aurait un moyen plus humain à notre disposition pour terminer notre vie, il n’y a pas de doute que ça apaise le poids de notre situation quotidienne.»
Pour tous
Outre l’effet sur sa situation personnelle, cette décision a aussi de quoi donner espoir et confiance à tous les Canadiens qui, un jour, pourraient être frappés par le même destin. «N’importe qui peut se retrouver dans une situation insoutenable, ça menace tout le monde. On a tous peur de mourir, mais on a moins peur de mourir que du type d’agonie qui nous est réservé», illustre-t-il.
Même son de cloche du côté d’Yvon Bureau, aussi responsable du collectif, qui a accueilli le jugement avec une joie sincère. «On sort le champagne!», a laissé tomber l’homme, qui mène ce combat depuis 30 ans, après avoir promis à son père, en fin de vie, que la manière de mourir au Québec changerait.
Cette nouvelle tombe à point selon lui, surtout qu’elle concorde d’ailleurs avec la 25e semaine nationale de la prévention du suicide. «Imaginez le nombre de personnes âgées qui ne penseront plus à utiliser le suicide, qui est vraiment dégueulasse en fin de vie. Ça va diminuer. Ça ne peut pas arriver mieux. Le suicide, c’est pour les gens qui sont tannés de vivre. L’aide médicale, c’est pour ceux qui sont tannés de mourir», a-t-il lancé qualifiant l’affaire de «grand moment».
«Désastre»
Opposé à l’aide médicale à mourir, le Dr Paul Saba, de la Coalition des médecins pour la justice sociale, accuse la Cour suprême de commettre une «erreur médicale». Georges Buscemi, de Campagne Québec-Vie, qualifie plutôt la situation de «désastre prévisible».
«Si on permet au médecin d’assister au suicide, jusqu’où on va aller ? 
Je prévois que d’ici 10 à 20 ans, il y aura simplement euthanasie sur demande Les gens qui voudront mourir vont pouvoir se faire euthanasier. 
Je ne vois pas comment on pourra empêcher une telle suite», déplore M. Buscemi, qui compte lancer une pétition incitant le Parlement à «ignorer» ce jugement.

CE QU’ILS ONT DIT
«Ça confirme que dans certains circonstances, l’aide d’un médecin ne serait non seulement légale mais appropriée d’un point de vue humain.»
- Ghislain Leblond, cofondateur du Collectif mourir digne et libre, atteint d’une maladie dégénérative  
«C’est une erreur de jugement. La Cour suprême a mis plus d’importance sur le droit de choisir la mort que sur les critères nécessaires visant à améliorer la vie.»
- Le Dr Paul Saba, de la Coalition des médecins pour la justice sociale

No comments:

Post a Comment