Cancer : de l'importance des mots employés quand le patient choisit la stratégie
29 août 2013
Les carcinomes canalaires in situ (CCIS) représentent 85 à 90 % des cancers du sein in situ, soit approximativement 15 à 20 % des cancers du sein. Ils se définissent comme une prolifération de cellules malignes à l'intérieur du réseau galactophorique, sans franchissement de la membrane basale [2].
Les chercheurs au Massachusetts General Hospital-Institute for Technology Assessment (Boston) ont émis l'hypothèse que selon que le personnel médical utilisait les mots carcinome, cancer de stade 1, cancer non-invasif, lésions, cellules anormales, pour décrire le CCIS à la patiente, celle-ci était susceptible de les interpréter de façon différente et que cela pouvait influer sur son choix de traitement.
San-Francisco, Etats-Unis -
Dans le cas de
pathologies graves, comme le cancer, le choix des mots utilisés par le
médecin pour désigner la lésion est crucial, et ce d'autant que ce choix
est susceptible d'influencer l'option de traitement choisie par la
patiente (quand possibilité de choix il y a). Un travail publié dans le JAMA [1].
En l'absence de consensus clairement établi
Les carcinomes canalaires in situ (CCIS) représentent 85 à 90 % des cancers du sein in situ, soit approximativement 15 à 20 % des cancers du sein. Ils se définissent comme une prolifération de cellules malignes à l'intérieur du réseau galactophorique, sans franchissement de la membrane basale [2].
La découverte d'un cancer in situ est une
situation de plus en plus fréquente grâce à la mammographie de dépistage
et à une meilleure interprétation de celle-ci. Il s'agit d'un cancer
ayant un risque potentiel d'évolution vers un cancer invasif. Néanmoins
« le délai peut aller de 5 à 40 ans, et n'intervient généralement que
dans 20% des cas » indiquent les auteurs de l'étude [1].
L'objectif thérapeutique est, bien sûr, la
prévention de la progression de la maladie, tout en conservant, autant
que possible, le sein. Il n'existe actuellement aucun consensus
clairement établi concernant le type de prise en charge des CCIS. En
France, les options thérapeutiques comprennent la mastectomie, la
tumorectomie associée à la radiothérapie ou la tumorectomie seule.
Aux Etats-Unis, en plus de ces différentes
options, la possibilité d'une surveillance active de ces CCIS est
apparue comme une « proposition raisonnable », à l'instar de ce qui se
fait dans le cancer de la prostate à des stades précoces.
On imagine alors l'importance que revêt le
choix des mots utilisés pour évoquer la pathologie lorsqu'il revient à
la patiente (avec son médecin) de choisir un traitement plutôt qu'un
autre, et a fortiori si l'on y inclut la surveillance active. Le travail
réalisé par des auteurs américains - et ne reflétant pas nécessairement
la pratique française face aux CCIS - a, prudemment, été mené chez des
patientes exemptes de cancer du sein.
Dire le mot "cancer" ou pas
Les chercheurs au Massachusetts General Hospital-Institute for Technology Assessment (Boston) ont émis l'hypothèse que selon que le personnel médical utilisait les mots carcinome, cancer de stade 1, cancer non-invasif, lésions, cellules anormales, pour décrire le CCIS à la patiente, celle-ci était susceptible de les interpréter de façon différente et que cela pouvait influer sur son choix de traitement.
Ils ont proposé 3 scénarios à 394 femmes
saines décrivant le diagnostic de CCIS et utilisant les termes soit de
cancer du sein non invasif, soit de lésions mammaires, soit de cellules
anormales, les messages expliquant les tenants et les aboutissants
potentiels de la pathologie étant par ailleurs identiques. Pour chaque
scénario, trois possibilités de traitement étaient proposées :
chirurgie, traitement médical et surveillance active.
Les résultats apparaissent dans le tableau
ci-dessous. De façon générale, les options non chirurgicales (médicale
et surveillance active) ont été préférées à la chirurgie.
Termes utilisés pour décrire le carcinome in situ, nombre (%) de participants
Option de traitements | Cancer | Lésions | Cellules anormales |
Chirurgie (n = 394) | 186 (47) | 136 (34) | 124 (31) |
Traitement médical (n = 394) |
79 (20) | 70 (18 | 82 (21) |
Surveillance active (n = 394) |
129 (33) | 188 (48) | 188 (48) |
P < 0,001
Les auteurs ont montré que, quand le cancer
est évoqué comme étant à haut risque, mais que le mot cancer n'est pas
mentionné, plus de 65 % des femmes font le choix d'un traitement non
chirurgical.
L'étude comporte bien sûr un certain nombre de
limites que rappellent les auteurs. Primo, la cohorte comportait des
femmes avec un niveau d'éducation élevé et bénéficiait d'une bonne
assurance, différant en cela d'une cohorte de population avec un CCIS.
Secundo, les femmes qui ont répondu n'étaient pas elles-mêmes concernées
par un CCIS, et auraient peut-être réagi différemment si elles avaient
été directement concernées. Tertio, les projections des aboutissements
possibles des CCIS étaient standardisés et non personnalisés.
Les auteurs concluent donc que « la
terminologie utilisée pour décrire un CCIS a un impact significatif sur
la perception que peuvent avoir les patientes des différentes
alternatives thérapeutiques possibles».
Références
- Omer Z.B, Hwang E.S., Esserman LJ et coll. Impact of Ductal Carcinoma In Situ Terminology on Patient Treatment Preferences. JAMA Intern Med. Published online August 26, 2013. doi:10.1001/jamainternmed.2013.8405
- InCA. Recommandations. Cancer du sein in situ. Octobre 2009
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